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La vie invente depuis la nuit des temps des procédés chimiques qui évoluent au rythme des changements climatiques de la planète. Ses ingrédients de base sont toujours les mêmes, environ 99 % de carbone, d’azote, d’oxygène, d’hydrogène et d’une vingtaine d’autres éléments qui interagissent avec des éléments extérieurs pour croître, se reproduire et réaliser d’autres fonctions biologiques. Ses mécanismes sont cependant complexes et ingénieux. Des chercheurs s’intéressent à l’un d’eux, qui a été crucial dans l’apparition de la vie : la photosynthèse. Des chercheurs espèrent optimiser le rendement des panneaux solaires photovoltaïques en étudiant ce phénomène chez les algues.
Les premiers organismes photosynthétiques
Les cyanobactéries et les algues rouges font partie des premières espèces qui ont habité la terre. Depuis des milliards d’années, elles ont eu recours à la photosynthèse pour produire l’énergie nécessaire à leur survie. Ce processus a besoin de la lumière pour fixer le carbone du CO2 et dégage du O2. Ces créatures marines ont été les premières à avoir su profiter de la lumière à une époque où l’intensité lumineuse était plutôt faible. Leur mécanisme a de fait développé la capacité de capter très efficacement l’énergie lumineuse. Alors que les plantes sont capables de convertir 12 % de l’énergie solaire, les cyanobactéries et les algues rouges peuvent atteindre 98 % d’absorption. Ces organismes présentent les systèmes de conversion de l’énergie solaire les plus efficients sur Terre. Ils doivent cette propriété à une antenne particulière qui se trouve à l’extrémité de leurs surfaces.
Les secrets de cette antenne appelées phycobilisome, soit le collecteur d’énergie lumineuse de l’appareil photosynthétique chez certains organismes marins, dont les cyanobactéries et les algues rouges, n’ont pas été encore tous révélés à ce jour.
Créatures marines dans la loupe des biosciences et du génie moléculaire
Une équipe de chercheurs de la School of Biosciences de la Birmingham University et du Netherlands Proteomics Centre de la Utrecht University s’est penchée sur le complexe protéique qu’est le phycobilisome afin de découvrir son système de captation et de transfert d’énergie lumineuse. Les résultats de cette étude serviront à améliorer les performances des cellules photovoltaïques. Alors que les panneaux solaires domestiques au Royaume-Uni présentent des taux de conversion de 10 à 20 %, l’équipe veut atteindre un taux d’efficacité de 95 %. Pour ce faire, ils ont entamé la première étape de la recherche qui porte sur le fonctionnement de la structure moléculaire du phycobilisome.
Leur étude s’intitule « A Colorful Pallet of B-Phycoerythrin Proteoforms Exposed by a Multimodal Mass Spectrometry Approach » et a été publiée le 9 mai 2019. Elle est coécrite par Sem Tamara, Max Hoek, Richard, Scheltema, Aneika, Leney et Albert J.R. Heck.
Le phycobilisome sondé par la spectrométrie de masse
Le phycobilisome est composé de deux grandes familles de protéines, à savoir les chromophores qui absorbent l’énergie pour la transférer, appelées aussi « donneurs », et ceux qui reçoivent l’énergie, dits « accepteurs ». Quand ils reçoivent la lumière, les accepteurs donnent aux cyanobactéries leur aspect fluorescent. L’étude des propriétés spectrométriques des chromophores amène l’équipe à comprendre l’absorption des différentes ondes lumineuses par ces molécules. Dans ce but, les chercheurs ont utilisé les méthodes avancées de la spectrométrie de masse (SM). Il s’agit d’une technique qui permet « de détecter et d’identifier des molécules d’intérêt par mesure de leur masse, et de caractériser leur structure chimique. »
Cette approche a permis de révéler des détails de chromophores distincts qui n’avaient jamais été analysés auparavant. Les chercheurs ont constaté notamment que le phycobilisome est composé d’une vingtaine de différents chromophores et que ces molécules réalisent différents taux de conversion de la lumière. Cette diversité est ce qui permet au système de fonctionner de manière optimale, en toutes circonstances, selon Albert Heck, professeur en SM. Il peut s’adapter en permanence et serait, de fait, plus raffiné que ce qu’en pensaient les chercheurs auparavant.

Hanen Hattab
Hanen Hattab est doctorante en sémiologie à l’UQAM. Ses recherches portent sur les pratiques d’art et de design subversifs et contre culturels comme le vandalisme artistique, le sabotage et les détournements culturels.
