27 Nov 2019
|
article de recherche
|
Santé
Étude des impacts à la tête lors de la pratique du soccer




Achetée sur Istock.com. Droits d’auteur.
Les blessures à la tête peuvent avoir des conséquences néfastes à court, moyen et long terme chez un athlète. C’est pourquoi plusieurs études sur ces blessures ont été réalisées au football et au hockey, reconnus comme des sports de contact comportant de hauts risques d’impacts violents à la tête. Bien que considéré par l’opinion populaire comme étant un sport sans contact, le soccer fait aussi parti de la liste de sports ayant un risque d’impact à la tête tout aussi élevé qu’au football et au hockey. Malheureusement, peu d’études ont mesuré le risque de blessures à la tête lors de matchs de soccer compétitifs. Dans ce contexte, ce projet de recherche avait pour objectif d’étudier les accélérations de la tête de joueurs et joueuses de soccer lors de matchs de compétition afin de mieux comprendre le risque de blessure à la tête dans ce sport. Les résultats ont notamment montré que les joueurs et les joueuses peuvent subir un grand nombre d’impacts à la tête au cours d’un match et que le risque de blessure est plus important pour un type d’impact spécifique au soccer, soit les techniques de tête. Mots-clés : accélération de la tête, risque de blessure à la tête, technique de tête, impact involontaire, mesures sur le terrain, soccer
Un risque de blessure à la tête insoupçonné
Les impacts à la tête peuvent engendrer des blessures à la tête, et ce, peu importe le sport pratiqué. Ces blessures sont considérées comme un fléau dans le monde sportif [1], et c’est pourquoi plusieurs études ciblant principalement les sports de contact comme le football ou le hockey ont été réalisées [5, 6]. Les blessures à la tête ne sont généralement pas associées aux sports considérés à faible risque d’impacts à la tête comme le soccer. Pourtant, les joueurs, et spécialement les joueuses de soccer, ne sont pas exemptés. Par exemple, au Canada, entre 2011 et 2017, le soccer a causé plus de blessures à la tête (45 %) que le rugby (27 %), le hockey (21 %) et la ringuette (7 %), chez les athlètes féminines âgées de 15 à 19 ans [2]. Les accélérations linéaires et angulaires de la tête sont identifiées comme le mécanisme le plus important de blessure à la tête [3, 4]. Au soccer, il y a un manque important de ce type de données collectées directement sur le terrain, ce qui limite la compréhension des mécanismes de blessure à la tête lors de la pratique de ce sport.
Les techniques de tête et les impacts involontaires
L’objectif de ce projet de recherche était d’étudier les accélérations et les différents types d’impacts à la tête lors de la pratique du soccer. Pour mesurer les accélérations de la tête des participants de l’étude (Tableau 1), les joueurs et joueuses de soccer portaient un bandeau instrumenté d’un capteur nommé SIM-G (Figure 1) lors de matchs de compétitions. Tous les matchs étaient filmés, permettant ainsi de diviser les impacts à la tête en deux types : techniques de tête et les impacts involontaires. Ces deux types d’impacts ont ensuite été subdivisés en catégories. Pour les techniques de tête, les catégories étaient : saut (aucun pied au sol), stable (2 pieds au sol), mouvement de rotation de la tête (2 pieds au sol) et instable (1 pied au sol). Pour les impacts involontaires, les catégories étaient : contact entre joueurs (ou joueuses), contrôle du ballon (avec le pied ou le torse), course (accélération ou décélération), changement de direction, impact au sol, instable et impact involontaire entre la tête et le ballon.

Figure. 1 Instrument de mesure des accélérations à la tête A- port du bandeau instrumenté (vue de côté) par une joueuse et B- capteur de mesure SIM-G inséré dans le bandeau
Nombre d’impacts et intensité des accélérations de la tête
Un total de 139 impacts à la tête ont été enregistrés chez les joueuses et de 239 chez les joueurs. Les techniques de tête ont causé 97 (70 %) impacts pour les joueuses et 92 (39 %), pour les joueurs, tandis que les impacts involontaires ont engendré 42 (30 %) impacts chez les joueuses et 147 (61 %) chez les joueurs. Les accélérations linéaires et angulaires de la tête des joueuses et des joueurs sont présentées à la Figure 2 et à la Figure 3, respectivement. Autant pour les joueuses que les joueurs, les accélérations linéaires et angulaires de la tête causées par les techniques de tête ont été plus élevées que les accélérations engendrées par les impacts involontaires. En effet, la proportion d’accélérations élevées (en rouge) est plus grande pour les techniques de tête que pour les impacts involontaires. À l’inverse, la proportion de faibles accélérations (en vert) est considérablement plus importante pour les impacts involontaires que pour les techniques de tête.

Figure.2 Accélération linéaire de la tête des joueuses et des joueurs
A-techniques de tête et B- impacts involontaires

Figure. 3 Accélération angulaire de la tête des joueuses et des joueurs
A-techniques de tête et B- impacts involontaires
Chez les joueuses, deux techniques de tête ont été les plus fréquentes, soit le saut et le mouvement de rotation de la tête (Figure.4 A). Chez les joueurs, le saut a été le plus fréquent. Pour les impacts involontaires, le contact entre joueurs (ou joueuses) a été le plus fréquent (Figure.4 B).

Figure. 4 Nombre total d’impacts à la tête par impacts spécifiques A- techniques de tête B- impacts involontaires
Conclusion
Cette étude a montré que les joueuses et les joueurs de soccer subissent un nombre important d’impacts à la tête lors de matchs de soccer. Les résultats préliminaires montrent aussi que les techniques de tête peuvent engendrer des accélérations linéaires et angulaires plus élevées que les impacts involontaires et pourraient donc entraîner un plus grand risque de blessure à la tête.
Information supplémentaire
Cette recherche a été présentée dans le cadre de la conférence American College of Sports Medicine sous le titre de « Biomechanical Analysis of Head Impacts during Real Time Soccer Play: a Preliminary Study » le 30 mai 2019 à Orlando, Floride, États-Unis

Caroline Lecours
Caroline Lecours est doctorante au Département de génie mécanique de l’ÉTS. L'objectif de son projet de doctorat est de déterminer la fréquence et le risque des commotions cérébrales lors de la pratique du soccer.
Programme : Génie mécanique

Yvan Petit
Yvan Petit est professeur au département de génie mécanique de l’ÉTS. Ses intérêts de recherche portent sur la conception assistée par ordinateur, la biomécanique, les dispositifs médicaux et de protection et la fabrication additive.
Programme : Génie mécanique Génie technologies de la santé
Chaire de recherche : Chaire de recherche du Canada en biomécanique des traumatismes à la tête et la colonne vertébrale
Laboratoires de recherche : ÉREST – Équipe de recherche en sécurité du travail LIO – Laboratoire de recherche en imagerie et orthopédie

Éric Wagnac
Éric Wagnac est professeur au département de génie mécanique de l’ÉTS. Ses recherches portent sur la biomécanique, la conception par ordinateur, la simulation par éléments finis, les dispositifs de protection et les outils chirurgicaux.
Programme : Génie mécanique
Laboratoires de recherche : LIO – Laboratoire de recherche en imagerie et orthopédie
Chaire de recherche :
Laboratoires de recherche :
Domaines d'expertise :

